Alors que le débat budgétaire bat son plein à l’Assemblée nationale, le budget de l’ESS se niche cette année encore dans le programme 159 dédié à l’expertise et à la météorologie (sic !) du ministère de la Transition écologique et solidaire. Trois questions à Marthe Corpet, responsable du plaidoyer au CNCRESS, le Conseil national des Chambres régionales de l’économie sociale et solidaire.
Le CNCRESS et ESS France communiquent ensemble sur le projet de budget 2020, pourquoi ?
Marthe Corpet : En effet, nous adoptons une position commune. C’est important parce que le CNCRESS et ESS France représentent ensemble toutes les familles de l’ESS : les coopératives, les mutuelles, les fondations, le mouvement associatif et les sociétés commerciales de l’ESS. Nous regrettons d’abord l’absence d’une vision consolidée de l’économie sociale et solidaire. Sur la question de l’emploi par exemple, nous voyons que le budget de l’insertion est en hausse à 120 millions d’euros, mais qu’il n’y a pas de soutien de fond au secteur associatif et aucune analyse sur la fin des contrats aidés. Quant à la ligne budgétaire strictement consacrée à l’ESS*, elle augmente globalement à près de 20 millions d’euros, mais les crédits sont en forte baisse sur le soutien aux têtes de réseau. Enfin, les moyens affectés aux dispositifs locaux d’accompagnement (DLA) progressent, mais pas autant que nous l’espérions : nous attendions 1 million d’euros supplémentaire.
Concrètement, qu’attendez-vous des parlementaires qui débattent du projet de loi de Finances (PLF) ?
M.C. : Nous souhaitons que les 75 millions d’euros de crédits non consommés du Parcours emploi-compétences (PEC) soient orientés vers la création d’un dispositif de 5.000 emplois d’utilité citoyenne, qui viendront soutenir le modèle associatif. Nous souhaitons voir supprimé le plafonnement à 40% de la déduction fiscale accordée au mécénat pour les dons les plus importants, car ils représentent 3 milliards d’euros sur un total de 7,5 milliards et constituent donc une ressource essentielle pour les associations. Nous voulons une fiscalité mieux adaptée pour la finance solidaire. Nous insistons aussi pour la création d’un crédit d’impôt à l’innovation sociale (CIIS), en extension du crédit impôt recherche (CIR) pour les structures à but non lucratif. Enfin, nous demandons un soutien financier mieux affirmé aux têtes de réseau, dont les crédits avaient déjà baissé l’an dernier, ainsi qu’un portage politique fort de la part du Haut-Commissariat à l’économie sociale et solidaire sur le maintien du budget des Chambres régionales de l’économie sociale et solidaire (CRESS), dont les missions ont été fixées par la Loi ESS de 2014.
Comment voyez-vous la suite du débat budgétaire ?
M.C. : Le vote du PLF est prévu début décembre. D’ici là, nous proposerons un nouvel amendement sur l’augmentation du budget du DLA qui n’a pas été retenu par la commission des Finances fin octobre, puis le jeu de la navette parlementaire enverra le texte au Sénat, avant qu’il ne revienne en dernière lecture à l’Assemblée nationale. Mais, surtout, nous rappelons que les politiques publiques qui concernent l’ESS émargent actuellement sur plusieurs budgets ministériels. A ce titre, nous appelons le gouvernement dans son ensemble à la cohérence des politiques publiques et des choix budgétaires qui impactent l’économie sociale et solidaire.