Les ministres de six pays de l’Union européenne ont marqué leur attachement pour l’économie sociale le 4 décembre au Luxembourg, pays qui présidait l’UE jusqu’à fin décembre. « La déclaration de Luxembourg » est « une feuille de route vers la création d’un écosystème plus complet pour les entreprises d’économie sociale ». Elle a été signée par l’Espagne, la France, le Luxembourg, la Slovaquie et la Slovénie. Martine Pinville représentait la France. Pour l’instant, il s’agit d’une démarche politique volontariste qui reconnaît l’effet de levier de cette économie pour la création d’emplois et l’innovation sociale.

En revanche, le noyau dur de la machinerie bruxelloise, à savoir « la stratégie pour le marché intérieur » est beaucoup moins bavard sur l’ESS…

Ainsi, dans ce document adopté en novembre, « les entreprises sociales ne sont même pas mentionnées », commente Denis Stokkink, rapporteur du groupe d’experts entrepreneuriat social (Geces) auprès de la Commission. Mais, celui qui est aussi fondateur du think tank « Pour la solidarité » explique que la position des institutions européennes sur l’ESS n’est pas « blanc et noir ». Par exemple, si la difficulté d’accès aux fonds structurels européens est réelle, il faut en imputer une part de responsabilité à la France et à son administration tatillonne.

 Le rôle des États

La posture de Bruxelles sur l’économie sociale reflète bien sûr la domination libérale de la Commission Juncker. Elle a d’ailleurs été dénoncée par le ministre luxembourgeois du travail, de l’emploi et de l’ESS, Nicolas Schmit, lors de son passage à Paris le 20 novembre. Ce jour-là, au colloque organisé par l’Atelier, plusieurs points de vue se sont confrontés. Michel Catinat, chef de l’unité « Clusters, économie sociale et entrepreneuriat » a pointé le manque de visibilité des acteurs de l’ESS. Il a également incité les États à se doter d’un appareil législatif. En tout cas, pour ce haut-fonctionnaire de la Commission, on ne doit pas aujourd’hui s’enferrer dans un débat sur la définition de cette économie, car il n’y a pas consensus sur le concept au Conseil européen. Ce serait « ouvrir la boîte de Pandore » tant les histoires et les acceptions diffèrent d’un pays à l’autre.

De son côté, Victor Meseguer, directeur de la mission « Social economy Europe », a insisté pour que la Commission reconnaisse l’ESS « comme une priorité réelle et pas seulement une option ».

Les participants à cette journée se sont accordés à dire que tout est une question de rapport de force. Le Geces, l’intergroupe Économie sociale au Parlement de Strasbourg, les réseaux d’acteurs, les lobbyistes restent mobilisés.