Olivier Dupuis est secrétaire général de la Fédération des entreprises d’insertion (FEI). Il porte un regard a priori positif sur le dispositif des entreprises d’insertion par le travail indépendant (EITI), autorisé par la loi du 5 septembre 2018 et entré en vigueur le 1er janvier 2019.

Quelle est la position de la FEI sur le dispositif des EITI, décrié par certains ?

O.D. : Toute expérimentation qui inclut et s’intéresse aux plus fragiles d’entre intéresse la Fédération des entreprises indépendantes. Nous devons chercher des solutions adaptées aux publics fragiles. Nous-mêmes, nous sommes nés d’une expérimentation… et pourtant, la FEI a fêté ses 30 ans l’an dernier. Elle est vieille, mais pas poussiéreuse ! Si les pionniers de l’insertion sont toujours là aujourd’hui, c’est parce qu’ils ont su s’adapter. Le travail et son organisation évoluent. Il faut que l’insertion change aussi. Il ne faut pas cesser d’expérimenter sous prétexte que ce que l’on fait est déjà bien.

Quels avantages voyez-vous aux Entreprises d’Insertion par le Travail Indépendant ?

O.D. : Les EITI vont être testées pendant 3 ans. Nous sommes plutôt optimistes, car le porteur du projet ne nous est pas inconnu : Charles-Edouard Vincent, fondateur de Lulu Dans Ma Rue et de Emmaus Défi a déjà montré son engagement pour lutter contre l’exclusion. Il nous a présenté le projet en détails. Le dispositif présente plusieurs avantages, comme celui d’apporter un cadre légal à un certain nombre d’emplois. Les personnes sont accompagnées dans leurs démarches administratives, telles que l’inscription au registre du commerce. Les EITI permettent aussi de sécuriser le travail de ces indépendants, en évitant le recours au travail au noir. Enfin, la dimension de dynamisation des territoires et des quartiers nous a séduit. Les prestations rendues sont des services de proximité, tels que du bricolage, de l’assistance pour les courses, les tâches du quotidien que les gens n’ont plus la capacité de faire. Cela permet de créer du lien entre des habitants et les personnes en train de construire leur avenir professionnel.

Comprenez-vous les inquiétudes que suscitent l’arrivée des EITI ?

O.D. : Ce qui inquiète certains membres du secteur, c’est qu’il ne s’agit plus d’insertion par le travail “à l’ancienne”, dans le sens où il n’y a pas de contrat de travail. On entend beaucoup parler “d’uberisation” du travail ces temps-ci. Mais si le monde de l’insertion s’en empare pour faire de l’Uber social, c’est une piste à explorer. Nous n’avons aucun doute sur le porteur du projet, il n’y a donc pas de raison de se priver de ce nouvel outil. Rappelons aussi que l’expérimentation est fixée à 3 ans, dans un cadre clair et délimité par la loi.